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Industrie maritime: les technologies, une bouée de sauvetage

L’industrie et les chercheurs œuvrent main dans la main afin de relever les défis du 21e siècle

Alain Richard,
Alain Richard, capitaine à l’Administration de pilotage des Laurentides, qui gère la navigation sur le Saint-Laurent. Photo courtoisie


L’industrie maritime se tourne de plus en plus vers l’innovation pour gagner en efficacité, renforcer la chaîne d’approvisionnement ou réduire son empreinte environnementale. Voici trois bons exemples d’innovation qui ont été mis de l’avant par l’industrie maritime d’ici. 

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OPTIMISER LE TRAFIC SUR LE SAINT-LAURENT

Les navires commerciaux qui circulent sur le Saint-Laurent font face à de nombreux défis de navigation dus, entre autres, aux courants marins, aux marées et aux fluctuations dans les largeurs et les profondeurs des eaux. 

L’Administration de pilotage des Laurentides (APL), qui gère la navigation sur le fleuve entre Les Escoumins et Montréal – les zones jugées les plus risquées –, a mis au point un système d’optimisation du trafic afin d’en améliorer la fluidité.

« L’application permet, par exemple, de déterminer le trajet le plus court pour arriver d’un point à un autre. On peut aussi indiquer à un navire le meilleur moment pour arriver aux Escoumins pour ne pas avoir à ralentir sa vitesse jusqu’à Montréal », explique Alain Richard, capitaine à l’APL.

Le système se révèle aussi utile pour les bateaux de passagers qui, en raison de leur hauteur, ne peuvent passer sous le pont de Québec qu’à marée basse. « On est alors en mesure de leur conseiller de ralentir ou d’augmenter leur vitesse pour arriver au meilleur moment possible. Cela leur évite d’avoir à jeter l’ancre en attendant que la marée baisse », ajoute Alain Richard.

Développée en collaboration avec Innovation maritime, la technologie entraîne des gains d’efficacité de la chaîne logistique et améliore la sécurité de la navigation puisque moins de navires sont mis à l’arrêt temporairement. C’est sans parler de l’avantage environnemental. 

« Les trajets étant optimisés, les navires utilisent moins de carburant et émettent donc moins de gaz à effet de serre », souligne le capitaine. 

Chaque année, on comptabilise 9000 passages de navires sur cette autoroute maritime. C’est dire l’importance de bien planifier ce trafic. 

Alain Richard,
Le Bella Desgagnés assure le ravitaillement des nombreuses communautés de la Basse-Côte-Nord toujours privées de lien routier ou ferroviaire avec le reste du monde. Photo d'archives, Agence QMI

UNE MÉGABANQUE DE DONNÉES MARITIMES

Depuis 2016, plusieurs joueurs de l’industrie – garde côtière, administrations portuaires, transporteurs, etc. – partagent leurs données avec le Système d’information maritime (SIM).

L’outil, qui a été mis en place grâce à une initiative conjointe de la Société de développement économique du Saint-Laurent (SODES) et d’Innovation maritime, est venu combler une lacune importante. 

« L’industrie génère en continu une grande masse d’informations qui n’étaient pas compilées ni traitées. On a voulu développer un outil qui serait capable de les analyser pour que les intervenants de l’industrie puissent avoir accès à des données fiables pour la prise de décision », explique Sylvain Lafrance (en médaillon), directeur général d’Innovation maritime, le centre de recherche appliquée affilié à l’Institut maritime du Québec (IMQ). 

Les mouvements des navires, le type de navires (vrac ou conteneurs) qui circulent sur le Saint-Laurent, les vitesses de navigation, le type de marchandises transportées, les capacités de chargement de la flotte... Toutes les six secondes, le SIM enregistre une grande variété d’informations dans différentes bases de données. Elles sont ensuite filtrées, structurées et analysées grâce à des outils d’extraction et de traitement performants. 

Le SIM est une interface ouverte accessible à l’ensemble de l’industrie, mais aussi aux chercheurs, aux organisations et au grand public, qui peuvent interroger les différentes données. 

« Une municipalité pourrait, par exemple, obtenir des données précises sur le trafic maritime en vue d’un projet d’investissement afin d’améliorer ses installations portuaires », souligne Sylvain Lafrance.

En 2021, Innovation maritime a reçu une aide financière de 900 000 $ pour le développement de la phase 2 du SIM pour l’intégrer au corridor économique intelligent du Saint-Laurent. 

« Cela va nous permettre d’aller plus loin dans l’utilisation des données en intégrant des outils de l’intelligence artificielle afin de renforcer les analyses et d’encore mieux suivre l’évolution du secteur. Et à partir de 2023, on vise à élargir la collecte de données aux Grands Lacs », révèle M. Lafrance. 

PRIORISER LES MARCHANDISES ESSENTIELLES GRÂCE À L’INTELLIGENCE ARTIFICIELLE

C’est durant la première vague de COVID-19 qu’a été développé le système CargO2ai. Il n’a fallu que 10 semaines pour mettre au point cet outil technologique qui permet d’identifier les marchandises dans les conteneurs. L’objectif : acheminer le plus rapidement possible le matériel médical, les médicaments et les produits alimentaires jugés prioritaires dans le contexte de la crise sanitaire.

« L’application identifie les conteneurs contenant ces marchandises avant même l’arrivée des cargos au port, ce qui permet d’accélérer leur manutention une fois qu’ils sont à quai, explique Daniel Olivier, directeur Veille stratégique et Innovation au Port de Montréal. Ces marchandises sont rapidement prises en charge par les transporteurs qui les amènent à destination. »

CargO2ai a été développé dans le cadre d’un partenariat entre le Port de Montréal, CargoM, Scale AI (la supergrappe canadienne de l’intelligence artificielle) et Ivado Labs, qui a mis au point l’algorithme d’intelligence artificielle.

Depuis que la solution est en place, ce sont quelque 7200 conteneurs qui ont été manutentionnés de façon prioritaire. « L’algorithme est devenu de plus en plus performant avec un taux d’efficacité qui est passé de 80 % à 92 % », affirme Daniel Olivier. 

Maintenant qu’elle a fait ses preuves, la technologie pourrait servir à une plus large utilisation. 

« On est en train d’explorer différentes avenues, précise Daniel Olivier. Elle pourrait par exemple avoir une utilité pour accélérer la livraison de matériel critique, comme des matériaux lors de la construction d’un hôpital. »

Elle suscite également de l’intérêt à l’étranger. Le Port de Montréal envisage un partenariat avec le Port d’Anvers-Bruges, en Belgique, pour partager sa technologie. 

Développé dans l’urgence en réaction à une crise sanitaire et logistique sans précédent, CargO2ai pourrait donc aller loin.

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